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Par Marie Sénéchal le 21/08/2023
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Le centre lillois privé Celiobe mise sur la psychologie pour prendre en charge l'obésité
Dans les Hauts-de-France, l'obésité touche près de 22% de la population. Ce qui en fait la région la plus touchée de
France métropolitaine. L'hôpital privé La Louvière à Lille développe un centre spécialisé où le suivi psychologique
est central.
"Nous travaillons sur comment se rendre disponible aux sensations alimentaires, quoi faire de son histoire, appréhender l'image de son corps", énumèrent Sarah Amar et Nadia Decaestecker, deux des neuf psychologues du centre libéral de prise en charge de l'obésité (Celiobe) de l'hôpital privé La Louvière à Lille (Nord) le 20 juillet. C'est le corps de métier le plus représenté dans l'équipe de professionnels de santé qui travaillent sur ce centre du groupe Ramsay santé. Ce travail comportemental qui doit mener à une "connexion à soi" et à un "apaisement" est l'objectif que se fixe le Celiobe pour ses patients. "La sensation alimentaire est une sensation corporelle. Avant cela, il faut se demander "suis-je tranquille intérieurement ?", c'est là que l'on voit l'importance de la part émotionnelle", explique le Dr Dominique Boute, coordinateur médical depuis l'ouverture du centre en 2011, endocrinologue, diabétologue et nutritionniste. Il poursuit : "C'est pour cela que j'ai insisté sur le fait que les psychologues interviennent d'emblée, quand dans d'autres centres la psychologie est mobilisée seulement en cas de troubles du comportement alimentaire."
Les patients arrivant au Celiobe sont en effet vus par une équipe de professionnels, dont une psychologue, mais aussi une infirmière, une diététicienne et un médecin. Ils suivent ensuite des programmes d'éducation thérapeutique du patient (ETP) en groupe, gérés par les psychologues et les diététiciennes. Les "ETP psy" concernent la compréhension, l'accueil et la gestion des émotions, les pensées et leur influence sur ces émotions, l'apprentissage à se "rendre disponible" pour ces dernières.
Les "ETP diet" concernent les idées reçues sur l'alimentation ou les effets des régimes. Toute cette partie dure six mois, à raison de deux heures par semaine. Entre-temps, les patients font également un bilan avec le pôle d'activité physique avec différentes consultations, ils réalisent un test de marche et répondent à un questionnaire sur leur sommeil.
Le Celiobe s'est étendu et occupe désormais le sixième étage de l'hôpital La Louvière à Lille. (Celiobe)
Une équipe dimensionnée aux besoins de la région
Deux patientes utilisent la salle de sport de l'hôpital La Louvière.
(Marie Sénéchal/Hospimedia)
L'approche par le collectif est une manière pour les patients de prendre conscience qu'ils ne sont pas seuls et de pouvoir échanger entre eux. "Voir que les problèmes sont partagés les fait progresser", remarque Dominique Boute qui évoque ensuite les indicateurs de santé perçus que le Celiobe a intégrés au parcours. Ces indicateurs montrent qu'entre la première évaluation évoquée précédemment et l'évaluation de mi-parcours effectuée avec la même équipe de professionnels après huit à dix semaines de prise en charge, "les choses bougent en matière d'image de soi alors qu'ils n'ont pas réellement maigri. Pour autant la relation à soi commence à évoluer." Le parcours est commun depuis "environ sept ans pour les personnes éligibles à la chirurgie et celles qui choisissent l'approche médicale. L'obésité n'est pas une pathologie chirurgicale d'emblée", rappelle le médecin. Le parcours se divise après les ETP de renforcement qui font suite au bilan de mi-parcours.
Depuis le 27 mars, le Celiobe est installé au sixième étage de l'établissement et a désormais à disposition dix-neuf bureaux et cinq salles d'éducation thérapeutique, en plus d'un secrétariat et d'une salle d'attente. 3 413 patients y sont suivis. Sur les six derniers mois, 600 nouveaux patients sont pris en charge au Celiobe. "Avant la pandémie, nous avions 1 400 nouveaux patients par an", souligne Chantal Hanquiez, cadre de santé et responsable du Celiobe. Avec l'extension du centre et son déménagement, 2 400 patients supplémentaires peuvent être accueillis, précise-t-elle. Cet agrandissement des locaux va de pair avec une hausse des ressources humaines. L'équipe est composée de neuf psychologues, mais aussi de sept diététiciennes, cinq infirmières, six secrétaires, quatre médecins et la cadre de santé. S'ajoute à cela le pôle d'activité physique composé de deux médecins du sport, deux éducateurs médico-sportifs et une diététicienne. "Nous avons dimensionné la structure pour répondre à un problème de santé publique à un stade précoce de la maladie", note Dominique Boute.
Des messages de prévention inadaptés
Les agrandissements successifs en 2017 et en 2023 ne sont "pas bon signe sur un plan de l'évolution de santé publique car cela veut dire que le besoin reste toujours aussi important", admet Dominique Boute. Le médecin travaille depuis trente ans sur l'obésité. Il a participé au programme national nutrition santé de 2001, qui est aujourd'hui, estime-t-il, encore valable scientifiquement. Pour autant, "le modèle ne marche pas" et les chiffres de l'obésité s'aggravent d'année en année. Il propose deux explications à cela. La première concerne l'organisation des soins dans l'obésité. "Avant que la situation ne s'aggrave, qu'ils sont concernés par la chirurgie bariatrique, les gens sont livrés à eux-mêmes, ils trouvent des régimes alors que nous savons que la restriction cognitive ne fait qu'aggraver encore la situation. Il n'y a pas vraiment d'accompagnement structuré."
C'est l'objectif du Celiobe, d'arriver avant que les patients ne soient éligibles à la chirurgie, même si l'hôpital de La Louvière a une activité de chirurgie bariatrique. La seconde a à voir avec les messages de prévention que le médecin juge inadaptés. "Ils génèrent de la charge mentale, de la charge émotionnelle. Ils enferment dans une pression sur le poids avec des règles à suivre ce qui découle sur une déconnexion de soi. L'information nutritionnelle est scientifiquement valide mais elle ne suffit pas." Dominique Boute a réalisé une étude sur 250 patients du Celiobe et a constaté que "près de 50% des portes d'entrée vers l'obésité sont émotionnelles" telles que des situations de deuil ou de chômage. Il prépare par ailleurs un ouvrage composé de témoignages de personnes obèses, à destination des patients mais aussi des professionnels afin de les aider dans la compréhension de cette maladie.
Le Celiobe dispose de cinq salles d'éducation thérapeutique depuis son
agrandissement. (Celiobe)